Le (léger) cadre légal international, européen et wallon des PFAS - Strelitzia goutte CC BY 2 0 DEED
Photo: Strelitzia goutte CC BY 2 0 DEED

- Par Luc Depré

Le (léger) cadre légal international, européen et wallon des PFAS

Récemment, le spot a été mis sur différentes crises sanitaires liées aux PFAS (substance per- et polyfluoroalkylées). Ces polluants dangereux pour la santé de l’homme et l’environnement sont éternels.

Parmi les neuf limites planétaires conditionnant l'habitabilité de la planète, l'introduction d'entités nouvelles dans la biosphère est déjà considérée comme dépassée. La prise de conscience du rejet massif dans l'environnement de PFAS aggrave ce constat.

Toute l’Europe est concernée. Les derniers recensements parlent de plusieurs milliers de sites industriels lourdement pollués. La Belgique n’est évidemment pas épargnée, ni au Nord, ni au Sud.

EQUAL s’est intéressé au cadre légal international, européen, et wallon.

1. Droit international et européen

    Une grande partie de ces molécules sont couvertes en tant que POP (polluants organiques persistants) par la convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement (1998) et par la convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants (2001).

    À l'échelon de l'Union européenne, les PFAS sont partiellement régulés par le règlement POP 2019/1021 et le règlement REACH 1907/2006.

    Le règlement POP 2019/1021 vise à protéger la santé humaine et l’environnement en éliminant ou en limitant la production et l’utilisation des POP, tels que définis dans la convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants ou dans le Protocole de 1979 à la convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance relatif aux polluants organiques.

    Le règlement REACH 1907/2006 vise à sécuriser la fabrication et l’utilisation des substances chimiques en recensant, évaluant et contrôlant les substances chimiques fabriquées, importées et mises sur le marché européen. La stratégie pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques mentionne spécifiquement les PFAS comme étant d’intérêt prioritaire pour la gestion des risques. Toutefois, certains PFAS sont actuellement exemptés des processus de REACH.

    Une révision de la réglementation REACH était amorcée, lors de laquelle 5 Etats membres (Suède, Norvège, Danemark, Pays-Bas et Allemagne) demandaient une restriction globale des PFAS, mais cette révision a été abandonnée.

    Il existe également des règlementations sectorielles, telles que la directive 2020/2184 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine qui vise à introduire de nouvelles règles pour protéger la santé humaine de la contamination des eaux destinées à la consommation humaine en garantissant leur « salubrité et leur propreté », la directive 2010/75/UE relative aux émissions industrielles, ou encore le règlement 2023/915 concernant les teneurs maximales pour certains contaminants dans les denrées alimentaires.

    Dans la directive 2020/2184, une valeur maximale de concentration des PFAS est fixée à 100 nanogrammes par litre et un autre paramètre plus global, intitulé « PFAS (total) », est également introduit avec une limite de qualité associée de 0,50 µg/L, ces normes entreront en vigueur en 2026.

    2. Droit wallon

        Le Code de l’eau est applicable en l’espèce, il a récemment été modifié par un décret du 20 avril 2023 en ce qui concerne la qualité des eaux destinées à la consommation humaine et par un arrêté wallon du 1er juin 2023 modifiant diverses dispositions en ce qui concerne la qualité de l'eau destinée à la consommation humaine. Il faut s’en référer aux articles D.180 et suivants du Code de l’eau wallon tel que révisé.

        Plus particulièrement, l’article D. 183 est particulièrement intéressant en ce qui concerne les PFAS, il se lit comme suit :

        " Art. D.183.

        § 1er. Lorsque la salubrité et la propreté de l'eau ne sont pas assurées, la fourniture de l'eau destinée à la consommation humaine est interdite.

        Sans préjudice de l'article D.192, les eaux destinées à la consommation humaine sont considérées comme salubres et propres si toutes les exigences suivantes sont remplies :

        1° ces eaux ne contiennent pas un nombre ou une concentration de micro-organismes, de parasites ou de substances constituant un danger potentiel pour la santé humaine ;

        2° ces eaux sont conformes aux valeurs paramétriques des paramètres chimiques et microbiologiques fixées par le Gouvernement, conformément à l'article D.181, § 1er, alinéa 1er, 1°.

        En ce qui concerne les paramètres indicateurs, les valeurs paramétriques sont fixées uniquement à des fins de contrôle et en vue du respect des exigences énoncées aux articles D.188 et D.190.

        Le Gouvernement fixe des valeurs pour des paramètres supplémentaires ne figurant pas dans les paramètres fixés en vertu des alinéas 2 et 3 lorsque la protection de la santé humaine l'exige. Les valeurs fixées satisfont, au minimum, aux exigences de l'alinéa 2, 1).

        § 2. Sans préjudice de l'article D.193bis, les fournisseurs se conforment aux autres mesures, exigences ou modalités arrêtées par le Gouvernement en vertu de l'article D.181, § 1er.

        § 3. Le Gouvernement détermine la procédure à suivre en cas de survenance d'événement portant atteinte à la qualité de l'eau destinée à la consommation humaine.

        Il précise les autorités publiques chargées d'intervenir et les mesures minimales à prendre par les fournisseurs afin d'éviter les dangers pour les consommateurs et de permettre le rétablissement de la salubrité et de la propreté de l'eau".

        Les normes limites au total PFAS et à la somme des PFAS, telles que fixées dans la directive 2020/2184, sont reprises dans l’arrêté du 1er juin 2023, et seront également applicables à partir de début 2026. Néanmoins, hors application de ces seuils, on peut se demander au vu des nombreuses contributions scientifiques sur le sujet si l’eau contaminée aux PFAS peut réellement être considérée comme salubre et propre au sens de l’article D.184, §1er,1° étant donné qu’elles constituent un danger potentiel pour la santé humaine…

        L’article D.184 du Code de l’environnement wallon inscrit comme infraction la contravention à certaines dispositions du règlement n°1907/2006 REACH.

        Expertises liées: Environnement