Pesticides : le principe de précaution est renforcé par l’arrêt de la CJUE du 25 avril 2024 - © Nicolas DUPREY / CD 78
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- Par Equal team

Pesticides : le principe de précaution est renforcé par l’arrêt de la CJUE du 25 avril 2024

Ce 25 avril 2024, la CJUE a rendu un arrêt dans deux affaires en matière de pesticides qui vient renforcer l’application du principe de précaution.

Cet Arrêt est rendu sur des renvois préjudiciels de juridictions néerlandaises qui avaient demandé à la Cour de Justice de l’Union européenne (« CJUE ») d'interpréter les articles 4, 29 et 36 du règlement européen du 21 octobre 2009 qui régissent, respectivement :

  • les critères d'approbation des substances actives,
  • les conditions d'autorisation de mise sur le marché (AMM) des produits phytopharmaceutiques et
  • la procédure d'examen par les États membres en vue de cette autorisation.

Ces questions ont été posées dans le cadre de contentieux opposant PAN Europe - Pesticide Action Network (PAN Europe) réseau d'ONG européennes qui promeut l'adoption de solutions alternatives aux pesticides - au College voor de toelating van gewasbeschermingsmiddelen en biociden (« CTGB », en français : le Collège pour l'autorisation des produits phytopharmaceutiques et biocides), un organisme administratif dépendant du gouvernement néerlandais. Les contestations portaient sur la réautorisation de trois produits : le Closer (sulfoxaflor), le Dagonis (difénoconazole) et le Pitcher (fludioxonil).

Selon la première décision de la Cour, l'autorité compétente d'un État membre chargée d'évaluer une demande d'autorisation de mise sur le marché d'un produit doit prendre en compte « les effets indésirables que les propriétés perturbant le système endocrinien d'une substance active contenue dans ledit produit sont susceptibles de causer sur l'être humain, compte tenu des connaissances scientifiques ou techniques pertinentes et fiables qui sont disponibles au moment de cet examen » (§§ 68 et 100).

Cela signifie donc que la CJUE précise que les formulations de pesticides doivent être testées pour leurs propriétés perturbatrices endocriniennes, et pas seulement pour leurs substances actives.

Dans la deuxième décision, les juges apportent plusieurs précisions sur l'interprétation de l'article 36 du règlement.

En premier lieu, l'État membre qui prend une décision concernant l'autorisation de mise sur le marché d'un produit dans son pays peut s'écarter de l'évaluation de risques réalisée par l'État membre ayant examiné la demande initiale, « notamment lorsqu'il dispose des données scientifiques ou techniques les plus fiables, dont ce dernier État membre n'a pas tenu compte lors de la préparation de son évaluation, qui identifient un risque inacceptable pour la santé humaine ou animale ou pour l'environnement » (§ 83).

En second lieu, la Cour fait référence à son arrêt du 19 janvier 2023 (C-147-21) qu’elle résume comme suit : « les dispositions régissant l’octroi des autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques doivent garantir un niveau élevé de protection et que, lors de la délivrance de telles autorisations, l’objectif de protection de la santé humaine et animale ainsi que de l’environnement « devrait primer » l’objectif d’amélioration de la production végétale » (§ 90) et rappelle que le règlement se fonde sur « le principe de précaution, et ce afin d’éviter que des substances actives ou des produits mis sur le marché ne portent atteinte à la santé humaine » (§ 92).

Enfin, la Cour affirme que « l’autorité compétente d’un État membre chargée d’évaluer une demande d’autorisation de mise sur le marché d’un produit phytopharmaceutique est tenue, lors de l’examen de cette demande, de prendre en compte les effets indésirables que les propriétés perturbant le système endocrinien d’une substance active contenue dans ledit produit sont susceptibles de causer sur l’être humain, compte tenu des connaissances scientifiques ou techniques pertinentes et fiables qui sont disponibles au moment de cet examen » (§ 100).

Pour consulter cet arrêt, cliquez ici.

Notons également que le lendemain, le 26 avril, la Commission a défini les critères et les principes directeurs du concept de l’ « utilisation essentielle » d’une substance via une communication publiée au Journal officiel de l'UE.

Expertises liées: Environnement, Gestion publique et textes légaux